Le dernier échange entre AstroLulu et Bradi (donc, entre experts) m'a donné l'idée de descendre un peu
de niveau et de tenter une vulgarisation...
Tout d'abord ; qu'est-ce que le "
Chromatisme" ?
1) un abus de langage... (aberration chromatique, cela existe, le reste : c'est souvent tout
et n'importe quoi, sauf en musique
)
2) En astro, on considère généralement que le "chromatisme" est le phénomène de décalage des
couleurs observées sur les étoiles ou les planètes.
Donc, cette "aberration chromatique" peut être provoquée par plusieurs choses :
- condition météo (humidité, givre, etc...)
- température
- turbulence
- optique
- et tous combinés
Du côté optique, pas de problème : on en revient à la notion de prisme et de déviation de la lumière
entre milieux différents (Newton et la Pomme
).
Dans un tube ou une lunette, la lumière franchit une série de surfaces en verre / air qui ont pour effet de
décomposer vers son spectre = étoiles multicolores...
Une même étoile pourra être rouge d’un côté et bleu de l’autre !
Dans ce cas... On parle (à tort, mais soit...) de "
Chromatisme expérimental"...
"instrumental" car c'est l'instrument qui provoque l'aberration.
Avec l'atmosphère, c'est évident que c'est le caractère "chaotique" de ses composants
(gouttes, surfaces diverses, etc...) qui provoque l'aberration (qui sera amplifiée par
l'instrument, en finale, par la capture).
Au final, au plus de couche d'air, au plus de déformations...
Une jolie image trouvée sur le web :
Bon, maintenant que l'on sait d'où cela vient, comment le corriger ?
1) en avoir le moins possible lors de la capture...
Ben oui, c'est bête mais efficace....
2) utiliser un logiciel de correction d'image...
Et là, on peut déjà séparer en deux cas :
a) la photo a été prise avec un objectif photo
b) la photo a été prise avec un télescope
Si a), il existe de corrections automatiques pour l'aspect instrumental (filtre dédié)
dans DxO, Photoshop, UFRaw, Canon View Pro, Nikon Photo, etc...
- on indique objectif + appareil et il corrige automatiquement le chromatisme expérimental
Si b), c'est plus long... Et cela va dépendre du type de vue et de l'objet à corriger...
Soit
- l'aberration est uniforme (toute une image, comme une surface Lunaire avec un Meade ETX
)
- l'aberration n'est pas uniforme mais est sur des "grands objets" (au niveau capture, cela occupe une
bonne partie de l'image)
- l'aberration n'est pas uniforme et s'applique sur des objets de petites tailles (planète, étoiles, par ex...)
Commençons par le plus simple : l'aberration uniformeUne aberration, physiquement parlant, c'est cela :
Donc, le but est de "remettre" les couleurs en face de l'autre, et de corriger manuellement ce qui
a été "décalé".
Pour cela :
- ouvrir l'image
- accéder aux "couches" (RGB)
- examiner l'image "déformée" au niveau couleur
- sélectionner la couche d'une couleur qui dérange sur l'image (un "liseré" de cette couleur est visible)
- sélectionner toute l'image
- déplacer doucement pour faire disparaître le liseré
- sauver !
Ex : si le décalage est vers le rouge, sélectionner l'image dans la couche de couleur rouge
et la décaler légèrement pour que les "liserés rouges" disparaissent...
On fait cela pour toutes les déviations et on sauve...
Même si cela ne sera jamais "parfait" (il faudra descendre plus bas qu'un pixel),
on parvient à supprimer pas mal de déformation.
Plus subtil : l'aberration non uniforme "grand objet" Bon, là, le décalage ne sera pas uniforme sur toute l'image.
Donc, si on rectifie (méthode précédente) correctement d'un côté de l'objet,
on verra le décalage se voir de l'autre côté.
En gros, cela "bave" (beurk) de l'autre côté...
Rem : on trouve souvent le mot "anamorphique" collé au mot "chromatisme"
pour parler ce cela...
Mais une "anamorphose", mais c'est une déformation réversible de l’image,
(à l’aide d’un instrument optique placé près de celle-ci), ici, je ne sais pas trop si
cela s'applique réellement...
Ex d'anamorphose (rappelez-vous PIF Gadget ! Ok... c'est pour les "vieux"
)
Bon, ceci dit, revenons à notre aberration non uniforme...
Prenons comme "grand objet" la Lune qui occuperait 2/3 de l'image.
=> on va abandonner le mode RGB (red, green, blue) pour aller dans un mode
de représentation de la couleur plus "absolu" : le mode Lab.
Ce mode Lab est utilisé dans toute la colorimétrie pour servir de "base" pour les conversion, y
compris entre différents modes (du genre RGB to CMYK : pour une impression).
En fait, on ne parle plus de 3 couches : RGB qui s'additionnent, mais bien de 3 "valeurs"
qui se combinent, ce qui est différent...
On a L (Luminance), a (du vert au rouge), b (du bleu au jaune) et des valeurs,
qui peuvent varier en amplitude :
La composante L* de 0 (noir) à 100 (blanc).
La composante a* a généralement 600 niveaux sur un axe rouge (+299 valeur positive)
→ vert (-300 valeur négative) en passant par le gris (0).
La composante b* a généralement 600 niveaux sur un axe jaune (+299 valeur positive)
→ bleu (-300 valeur négative) en passant par le gris (0).
Mais les composantes a* et b* sont souvent
- notées par une valeur de +127 à -128 = 256 niveaux en 8 bits
- ou passer à +10899 / -12451 = 16 bits
etc.. pour 32 bits ou 48 bits...
Rem : nôtre œil
- dépasse rarement 16 bits ! Donc : bof...
- de plus, les couleurs n'aident pas à "résoudre" les détails
(car là, c'est la transition franche entre deux teintes qui aide)
- si les couleurs ne sont pas bonnes, elles perturbent la vision !
=> donc, autant les supprimer que les garder !
Et c'est précisément ce que l'on va faire...
Phase 1 : conversion vers Lab
- ouvrez votre outil de correction d'image favori et chercher à convertir l'image vers le modèle Lab
Ex :
Bon, à ce moment,
- on accède à la couche "b" et on applique un "flou gaussien" dessus
- on accède à la couche "b" et on applique un "flou gaussien" dessus
On alterne en examinant visuellement le résultat final...
Ne pas "pousser" de suite, y aller progressivement.
Quel niveau de flou est nécessaire ?
Il faut tester... En théorie, il en faudra plus dans la couche b que a
(rouge moins présent)
Remarque : comme d'habitude, cette méthode n'est pas absolue,
et il faudra peut-être "recadrer" ou corriger les couleurs pour un résultat optimal.
Plus subtil : l'aberration non uniforme "petit objet"A ce stade, plusieurs écoles existent...
Mais le problème vient que sur des petits objets, "flouter" comme dans la méthode précédente
risque de faire disparaître des détails longuement acquis...
Donc : pas glop !
En plus, nous assistons parfois au fait que, selon les filtres utilisés pour l'acquisition,
le résultat soit vraiment complexe à traiter.
Donc, on va tout appliquer, mais doucement...
1) on rectifie comme pour l'image globale (recalage des pixels via couche),
mais peut-être "partie par partie"... Les calques sont faits pour cela si deux
objets sont à corriger (surtout si ils sont écartés l'un de l'autre)
=> on sauve ! On a donc à ce stade une image "COPIE" la mieux rectifiée possible.
2) généralement, c'est la couche bleue qui dérange dans la photo...
Donc on va supprimer la partie "débordante" en la "soustrayant" à l'image,
et on va faire cela dans l'image "COPIE" (question de ne rien perdre).
Donc, de l'image COPIE
- passer en mode couche
- afficher la couche bleue
- copier l'image de la couche bleue vers une
nouvelle image (baptisée subtilement "BLEUE")
Revenir à "COPIE"
- fermer les couches
- Changer le mode de l'image "LAB" de RGB, vers Lab), comme dans la méthode précédente
- la sauver sous un autre nom ("LAB")
Depuis l'image "LAB"
- passer en mode couche
- afficher la couche "L" et copier le contenu
Revenir à "BLEUE"
- ajouter un calque
- passer l'image copiée depuis "L" de "LAB"
=> à ce stade, on récupère donc dans "BLEUE" des information clés pour la structure globale des
détails de l'image... Avec les informations qui sont "dérangeantes" !
- là, on va être subtil...
Premièrement, on règle un peu les niveaux sur le contenu de cette couche L copiée
pour que le contraste soit le mieux visible (faut doser avec essai/erreur)
Deuxièmement, on va progressivement modifier l'opacité de la couche L
=> en théorie, "l'arc lumineux" de l'aberration devrait disparaître
A ce stade, on ne perd rien : on sauve !
- Ensuite, on va "aplanir" le résultat pour récupérer une seule image...
- On copie ensuite cette image dans la couche bleue de l'image "COPIE"
originale...
- on supprime le mode couche
- on rectifie le résultat obtenu et si nécessaire, on re-rectifie l'aberration résiduelle
via la première technique...
OUF...
A ce stade, ceci doit vous paraître très théorique et peu pratique...
Mais il faut le "faire" pour voir ce que cela donne...
De nombreux tutos existent sur Internet, ici,
- c'est indépendant de tout logiciel...
- c'est pour s'entraîner avec le sien !
En plus, il existe des fonctions "automatiques" ici et là, en fonction du logiciel.
Mais il faudrait en faire la liste...
Donc, une demande pour les experts du forum :
- des remarques ?
- des ajouts ?
- pouvez-vous donner, sur base de vos nombreuses photos,
un exemple de la correction "globale" en utilisant ces techniques ?
De mon côté : je n'ai pas d'images en qualité correctes pour le faire...
N'oubliez pas : j'observe très peu... Je n'en ai guère le temps
A vous de jouer...